Manifeste pour une solidarité organisée

Handicap et vulnérabilité: Enquête sur les situations.

Pourquoi les choses ne s’arrangent-elles pas pour les personnes handicapées ou vulnérables et leur entourage ? Après avoir lu ce qui suit, posez-vous la question de savoir si une telle analyse des situations existe. Si vous n’en avez jamais vu, ou si vous avez du mal à répondre aux questions posées vous allez comprendre pourquoi tout fonctionne aussi difficilement.

Une personne handicapée ou vulnérable devrait avoir des anges gardiens, mais à défaut tout le monde s’accorde pour dire ceci: Elle doit être défendue; Son cas doit être pris en compte par une solidarité organisée; Sa situation doit être partagée par tous les acteurs qui l’entourent; Elle doit recevoir une aide opérationnelle chaque jour, etc.

Pourtant, dans la réalité, vous le savez, ce n’est pas comme cela que ça se passe. Il faut sans cesse lutter contre l’invisible qui ne permet pas de progresser. Le cœur, la bonne volonté, la compétence, la bienveillance de chacun ne suffisent pas. Les vides organisationnels, les prérogatives auto-déclarées ou non dites, les secrets partageables mais non partagés, les carcans administratifs, etc. font que cela ne marche pas, et vous aller découvrir pourquoi.

Tout le monde parle d’accompagnement du handicap sans jamais avoir défini l’organisation dont il s’agit.

Voici la preuve en 13 grandes questions. Pour chaque cas que vous connaissez, essayez d’y répondre. Nous vous aidons en posant d’autres questions et en apportant quelques commentaires …

Q1 : La situation de la personne est-elle prise en compte ?

La situation est-elle connue, répertoriée et suivie.

On va commencer par dire oui …tout en pensant aux cas laissés pour compte, non diagnostiqués, hors radars de nos institutions, laissés dans des situations dramatiques sans solidarité. Par quels moyens pourrait-on avoir la liste de ces cas.

Q2 : Qui défend la personne ? (premier grand ange gardien)

Qui (au sens d’un rôle) défend la personne, de façon ultime, en permanence, sur le long terme, jusqu’au bout. Comment ce rôle se dépatouille-t-il pour faire appliquer la loi et la solidarité. Avec quelle légitimité, quels soutiens, quelle identité, quelle autorité, quels financements le fait-il.

Parents, familles, conjoints, amis, conseil de famille, autres bonnes âmes, associations, confréries,  ordres,  institutions, professionnels, groupes de tout cela. Comment est choisi l’interlocuteur principal qui joue ce rôle. Comment est-il contrôlé. Comment travaille-t-il avec le défenseur des droits, le tuteur juridique. Où est la description de ce rôle et dans quel processus: nulle part.
Ps: un concept qui apparaît au voisinage de ce rôle est la” personne de confiance” mais pas du tout avec ses prérogatives là.

Q3 : Qui s’occupe du cas en permanence ? (second grand ange gardien)

Qui (au sens d’un rôle) s’occupe du cas, en permanence, sur le long terme, de façon transverse. Comment se dépatouille-t-il avec les complexités du système, les contre pouvoirs. Comment le fait-il en lien avec le défenseur ultime. Et de même: Comment le fait-il, avec quelle légitimité, quels soutiens, quelle identité, quelle autorité, quels financements.

Personne … et tout le monde, donc personne. Comment l’acteur qui joue ce rôle est-il choisit librement par la personne handicapée ou vulnérable et son défenseur ultime. Quel est l’acteur physique mandaté pour tenir ce rôle. Incontestablement il s’agirait d’une profession spécialement experte en complexités du système pour faire face à d’autres professionnels dans leurs complexités. Où est la description de ce rôle et dans quel processus; nulle part aussi. A inventer.

Q4 : Qui s’occupe du cas temporairement ? (ange gardien local, temporaire, de circonstance)

Qui s’occupe du cas, sur le court terme, de façon locale. De même que précédemment, avec quelle légitimité, quels soutiens, quelle identité, quelle autorité, quels financements. Comment s’articule son action avec le rôle de celui qui s’occupe du cas sur le long terme

On connait le “référent” local. Depuis peu on essaie le “coordinateur de parcours”, mais sans aucune intégration avec un processus, dans des expérimentations où on se heurte en permanence à des mystères et des bricolages “acteurs dépendants”, sans aucune lucidité du processus qu’on essaie de servir.

Q5 : Qui fait dans la “vraie vie” ? (là il y a du monde)

Qui fait “l’acte” (au sens d’un rôle), en ce moment, sur le court et moyen terme. Qui agit de façon directe et visible pour la personne.

Famille, parents, amis, aidants, éducateurs, animateurs, médecins, infirmières, assistants, … transporteur, maître nageur, apporteur de commissions, etc.

Là il y a du “monde” qui déclare à juste titre faire ou devoir faire aussi ceci et cela par nécessité, en se débrouillant par le fait que rien n’est organisé et qu’il faut le faire par humanité. Comment le fait-il en relation avec les rôles précédents. Rien n’est dit. C’est ici qu’on voit toutes sortes de prérogatives et pouvoirs s’imposer…

Q6 : Alors comment ça va ?

Comment, collectivement, est perçue, évaluée la situation.

Alors là plus rien. (et ta et ta ça va, comme disait Coluche). Quel est l’indicateur global partagé qui permet d’évaluer si ça va bien pour la personne accompagnée. Nous disons bien rien de rien, à part ici où là des enquêtes de satisfaction de la sacro-sainte qualité (voir infra). N’oublions pas aussi que la personne et son entourage sont en situation de dépendance pas forcement consentante. Et pourtant comment une intelligence collective pourrait-elle agir de concert sans partager l’état de la situation. Inventons l’indicateur du sourire.

Q7 : Qu’elle utilité produit-on ?

Comment et à qui est rapportée l’utilité produite par le système, et par chacun des acteurs.

Nous disons bien rapport d’utilité et non rapport d’activité (notion que tout le monde connait dans le monde sanitaire et médicosocial). Nous disons bien aussi utilité des acteurs, et là danger…

Q8 : Ya-t-il un pilote dans l’avion ?

Quel est l’organe de régulation (au sens d’un rôle) qui est mis en place pour créer, maintenir et arbitrer une telle organisation (au sens d’un processus). Qui en est le chef d’orchestre (au sens du pilote de processus), quels sont ses pouvoirs de coercition.

En dépit de tous les rapports déjà établis depuis des décennies, ici il y a un en vide institutionnel La description de cette organisation (au sens d’un processus) et inexistante. Ceci devrait interpeller l’ANAP et l’ANESM notamment Qui osera par ailleurs instaurer des mesures d’arbitrage et de coercition sur les acteurs ne respectant leurs rôles

Q9 : Hein quoi ?! De quoi parlez-vous ?

Les rôles dans ce processus (non décrit) sont-ils connus des acteurs

Forcement très mal, et s’ils le sont, ils le sont de façon intuitive et incomplète. Comment peut on imaginer décrire des rôles d’un processus qu’on ignore et encore pire comment peut on décrire des missions d’acteurs pour tenir tout ou partie de rôles indéfinis. C’est pourtant ce qui est fait.

Q10 : Ah ! Il faut se former à l’organisation ?

Les acteurs ont-ils toutes les compétences pour jouer les rôles. Comment sont-ils aidés ?

A condition de connaitre les rôles du processus, il conviendra de prévoir casting, information, formation, contrôle, mesures adaptatives. Comme pour une pièce de théâtre, il faut en comprendre le tout pour bien tenir le rôle.

Q11 : Comment fait-on pour se parler, se comprendre, se coordonner ?

Existe-t-il un système d’information commun entre tous les acteurs pour

  • partager les secrets de la situation et de l’intimité de la personne accompagnée;
  • s’entendre pour jouer de concert;
  • accepter qu’il y ait un chef d’orchestre;
  • accepter qu’on évalue en commun l’utilité qu’on y produit;
  • identifier les acteurs et pour gérer les relations

A ce jour rien de pareil n’existe encore. Aucune organisation transverse n’existe. Chacun y va de son système. Tout est en silos, par chapelles. Les secrets professionnels sont avancés pour renforcer cette situation. Concurrences et libéralités sont la règle. En attendant, les acteurs se débrouillent par transmissions de tous ordres, quand il y en a.

S’agissant de secrets sur une personne de surcroit fragile, qui a mandat de tenir l’Ethique et la sécurité des échanges.

Hors un système d’information n’a de sens que s’il est conçu au service d’une organisation, elle même décrite par un processus. Ça se complique quand cette organisation traverse les silos, les structures, les pouvoirs.

Mais c’est faisable si l’organisation est partagée et … organisée. Une organisation “organisée”, curieux non.

Q12 : Où est la ligne d’action ?

Pour la personne handicapée ou vulnérable, existe-t-il une ligne directrice (but ou projet de Vie) pour le long terme et des chemins plus courts (objectifs ou parcours de Vie) pour le quotidien ?

Ces buts et ces objectifs sont-ils partagés par tous les acteurs, servent-ils de repères et comment les situations sont-elles rapprochées de ces éléments. Projets individuels de ceci ou de cela. Regardez bien comment ça se passe … silos, chapelles, obligations légales vite “remplies”, etc.

Q13 : Peut-on essayer sans cesse ?

Existe-il une logique d’essais permanents. Le système est-il souple.

Pourtant, en matière de handicap on a juste un devoir d’essayer sans cesse. Mais du fait d’une dépendance non forcement consentante, en situation de pénurie, quand on a une “place”, on ne dit plus rien. On se contente de ce qu’on a, sinon.

Quelle est la capacité du système actuel à imaginer autre chose que des orientations d’une infernale complexité à modifier. Quelle est la capacité du système à sortir de la routine et à se mettre en situation d’essais permanents. Quelle est sa capacité à évaluer l’utilité produite par ces essais.

Ces quelques grandes questions illustrent bien le vide organisationnel actuel. Bien entendu, ici ou là, se rejoignent des idées et des expérimentations intéressantes. Mais on cherchera en vain la description d’un processus s’approchant de ce questionnement là.

Sans vison éclairée, on peut affirmer que le Système dit ce qu’il fait sans savoir ce qu’il fait !

Pourtant les normes qualité précisent bien que la première chose à faire en matière de qualité justement s’est d’identifier et de décrire LE processus majeur ou méta-processus de toute organisation.

Cela n’empêche pas toutes les institutions, associations, et “hauts machins” de ceci ou de cela de recevoir des certifications.

Il ne suffit pas de réduire les angoisses avec des méthodes et des audits de la même obédience, pour obtenir un “tampon” qui auto-affirme qu’on est bon et qui interdit toute remise en cause.

Il ne suffit pas de maintenir une affirmation fausse, contre-démontrée chaque jour, qui déclare: “nous écrivons ce que nous faisons et nous faisons ce que nous écrivons”, affirmation qui en réalité dit deux gros mensonges.

Le cas, ce n’est pas le handicap de la personne mais bien la situation que l’Etat laisse perdurer par un système de solidarité défaillant.

Le vide organisationnel est tellement prégnant qu’il en est invisible. Avez-vous eu connaissance d’un auditeur qualité penser à demander la description du meta-processus d’accompagnement dans telle ou telle institution s’occupant d’accompagner des personnes handicapées ou du coté de ceux qui sont en charge de s’en occuper transversalement.

Si l’efficience est l’efficacité de l’efficacité ou la qualité de la qualité, à quoi aurait abouti l’audit de l’efficience ici ou là, au cœur même de notre système de solidarité : assurément à un zéro pointé!

Comme bien d’autres initiatives courageuses sans doute, DEDICI travaille pour combler ce vide en partant de la personne et de son entourage. Mais que c’est difficile dans un climat d’incompréhension générale et de quasi maltraitance institutionnelle.

Accordons nous mutuellement du temps et de l’attention, pour entendre, écouter et prêter oreille, comprendre, contre-argumenter et adhérer à un autrement collectif, un imaginaire commun, mais avec méthode, avec une méthode organisationnelle de qualité.

Nous avons énormément de potentiel disponible. L’amélioration des situations passera forcement par une innovation organisationnelle majeure.

Que l’intangible vienne maintenant transcender un tangible limité, désorganisé.

DEDICI s’y consacre entièrement.