Je m’accuse et j’accuse

Je m’accuse et j’accuse chacun d’entre-nous, d’entre-vous, d’une paresse envers nos plus faibles, nos enfants, nos handicapés, nos personnes âgées.

Vous n’êtes pas d’accord ? Vérifions cela.

Vous êtes sans doute d’accord pour les protéger (bouclier) ; pour les défendre, (épée) ; pour les aider, bienveillants, à tout instant ; pour discerner leurs voix … sans voix,  les entendre, les écouter et les comprendre ; pour leur accorder du temps et de l’attention, de l’amitié, de l’Amour pour leur permettre de s’autodéterminer ; pour rechercher sans cesse pour eux des solutions ; pour évaluer leurs sourires ou leurs pleurs ; et d’en payer le prix en obligent la Société à partager une Solidarité.

Pour tout cela vous êtes d’accord, et pourtant je m’accuse et je vous accuse de ne pas avoir fait suffisamment d’effort encore pour savoir comment faire tout cela.

Et pour cela nous ne sommes pas encore d’accord.

Alors imaginons ensemble, pour Eux, qu’elle organisation souhaiterions-nous qu’ils aient autour d’eux. Qui seraient les anges gardiens, les justiciers, les héros, les saints qui feraient cela. Posons-nous la question du « c’est qui qui ». Et si nous ne savons pas répondre tant tout le monde y va de son refrain et de sa vision trop courte, désincarnons les rôles et écrivons un conte, une fable, un idéal. Rêvons pour Eux un instant ensemble. Réfléchissons, imaginons.

N’attendons pas un « Sauveur », une Loi, une Institution, un Expert de ceci ou de cela, un Professionnel, un Sachant, … le Temps. Ne déléguons rien aux  élus des « Meilleurs ». Pourquoi trouveraient-ils ce qu’ils ne  trouvent pas depuis toujours. Chacun d’entre-nous, d’entre-vous, impliqué plus que concerné, chacun de nous peut et doit réfléchir seul et écrire pour Eux, nos protégés. Ne soyons pas paresseux.

Et ce n’est peut-être pas si difficile si, plutôt que de se plonger et se perdre dans les détails des milles et unes situations toutes singulières et différentes les unes des autres,  nous nous accordons sur des principes jamais posés, mais qui nous relient tous et nous accordent tous de façon harmonieuse sur un Bon Sens d’une décence commune.

C’est à Eux de dire par nous ce qu’ils leur faut. Ne laissons pas les autres le dire pour Eux.

Protecteurs et défenseurs des plus vulnérables, voici deux questions :

Qui devrait protéger et défendre le plus faible d’entre nos protégés jusqu’au bout, avec quelle légitimité, quels pouvoirs.

Qui devrait rechercher, négocier et faire en sorte que tous ces trucs et machins, qui sont proposés par les bien-pensants, marchent pour que le plus faible de nos protégés puissent mieux vivre.

Sans directive, de grâce, ne retombez pas trop bas dans la réflexion. Sans incarnations trop directes, ne répondez peut-être pas trop rapidement les parents, les professionnels etc.,

Imaginez, décrivez individuellement comme dans une histoire d’un Autre Monde ces anges gardien là, leurs rôles et pouvoirs, un Autrement. Sûrement vous verrez apparaîtront nos points communs.

Il sera ensuite, sans aucun doute, très difficile de dire des acteurs sur Terre, ici ou là selon les situations, qui joue tel ou tel rôle et comment nous, la “Bienveillance”, nous les contrôleront.

Élaborons cela ensemble, sans « Grands Guides ». La nature chaotique est bien plus performante sans chefs élus.

Regarder la Nature, elle fonctionne bien sans chef, et chacun de ses éléments s’autodétermine dans la compétition pour les plus forts, et dans l’émulation, la solidarité et l’intelligence collective pour les plus faibles… et les plus Humains. Ainsi nos intelligences sauront ce qu’elles font.

Soyons intelligents collectivement. Faisons émerger une constitution à sanctuariser pour nos protégés . Et que ceux des « Meilleurs », empêtrés dans leurs conflits d’intérêts, s’abstiennent d’y participer.

Jean-Luc LEMOINE
www.dedici.org

L’habitat 100% inclusif

L’opportunité d’un accompagnement autrement.

En matière de handicap, l’injonction récente des institutions pour un habitat 100 % inclusif remet en perspective les immenses efforts des familles et de précurseurs depuis des dizaines d’années. La «Journée Régionale du Grand Est», le vendredi 30 novembre 2018 à Mulhouse, organisée par l’équipe du Dr Jean SENGLER du GHR Alister, sous la présidence de l’ARS et de la CNSA, rassemblait des expérimentations, mais aussi les éclairages de philosophes, de sociologues et d’ethnologues. Au delà de ce qui se dit généralement sur le sujet, cette journée a réussi à mettre en lumière une incontournable dimension transverse : l’accompagnement autrement.

Généralement ce qui est rapporté ou analysé de l’habitat inclusif pour le handicap, très médiatique et porteur de projets qui se ressemblent finalement tous, se limite souvent à des descriptions d’articulations d’architectures diverses dans des lieux particuliers assortis de formules de financements immobiliers variés. Ces débats là se complètent immanquablement par d’autres sur les organisations locales partagées reproduisant en quelque sorte, à une échelle plus petite, ce qui existe déjà dans les institutions. Ce sont du reste les mêmes acteurs auxquels il est confié les mêmes missions reproduisant ainsi le fameux « mais ça on le fait déjà ».

L’extra-muros déclaré ainsi risque d’être un intra-muros, une coquille protectrice inclue dans un extra-muros. Pourtant l’inclusion sociétale ne se fait pas si la coquille incluse est elle-même fermée. Reste donc l’éternel problème : comment vivre avec les autres, sujet du reste que nous pourrions traiter à partir des institutions existantes si le « chez soi » était une réalité.

L’analyse systémique réservée aux concepts les plus élevés, était ici étonnamment confirmée avec clarté par les réflexions d’intellectuels de la Vie. Elle révèle quelque chose de bien plus important.

Dans tous cas, dans toutes les situations, dans tous les lieux, partout ou se trouve la personne handicapée et son autodétermination, l’impératif est bien l’accompagnement humain autrement, dirons-nous profondément et totalement différent.

L’inclusion sociétale ne se fait pas sous l’organisation imposée d’intrus. Elle se fait grâce à l’apport d’invités dans l’intimité et la vie privée de personne handicapée. Reste pour les acteurs à connaître les rôles qu’ils joueront dans un processus qu’ils ignorent.

Tous les efforts d’innovation sont donc à concentrer sur ce point là.

Le « chez soi » qui doit impérativement exister pour que chaque être humain puisse se projeter, qu’il prenne la forme d’une chambre dans un foyer, d’un appartement dans une résidence, voire d’une cabane où on veut, pourvu que ce soit décent, tout cela ne peut convenir qu’avec un accompagnement innovant.

Voici l’interprétation de ce qu’ils ont dit dans cette journée :

Stéphane CORBIN, Directeur de la compensation à la CNSA
« Au delà des murs, parmi les éléments “principiels” (de principes), l’accompagnement autrement de la personne est majeur »

Bertrand QUENTIN, Philosophe Université Paris Est :
« On est chez soi partout, tant que nous sommes dans notre tête avec les autres »
« L’accessibilité relationnelle est sans doute plus importante que toute autre accessibilité »
« Attention à la confusion des rôles », nous rajoutons… semble-t-il par des acteurs ne comprenant pas les rôles d’un processus qu’ils ignorent encore.

Jean-Luc CHARLOT, Sociologue :
« Habiter ce monde ce n’est pas se loger »
« Attention à la conformité normative … aux solutions qui font bien, réductrices d’angoisses »

Eve GARDIEN, Ethnologue Université de Rennes
« L’expérience suédoise JAG, vieille de 20 ans déjà, interpelle »

Sur ces interventions, j’ai osé poser la question suivante :

Où sont donc les réflexions sur ces principes d’accompagnement autrement ?

  • Qui défend la personne et son autodétermination, avec quels pouvoirs (gouvernance) ?
  • Qui s’occupe de son cas, de sa situation et avec quels pouvoirs (pilotage) ?
  • Qui intervient ou aide et avec quels pouvoirs (interventions, rapport d’utilité) ?
  • Comment cela fonctionne-t-il, comme cela se régule-t-il ?

Aucun rapport n’a encore abordé ce sujet. Ne pensez-vous pas qu’il faille maintenant définir ce méta-processus* là ?

Stéphane CORBIN, directeur de la compensation à la CNSA et Christophe LANNELONGUE, directeur général ARS Grand Est ont admis que cette question là pourrait être la synthèse et la conclusion de la journée.

Jean-Luc LEMOINE
Administrateur de 5 associations parentales
Autiste asperger.
Militant impliqué, père de Nicolas un adulte autiste.
Président de DEDICI www.dedici.org

* Un process industriel, une procédure, un mode opératoire, ça s’applique. Un processus, et surtout un méta-processus « principiel » ça s’adapte à tous les cas, toutes les situations, toutes les singularités.